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Mise à jour : 27 janvier 2025 - Mise en ligne : 9 mars 2025, par Thierry HANNEDOUCHE
 
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Le don de rein vivant est une pratique essentielle pour pallier le déficit de greffons disponibles, offrant une meilleure survie du greffon et du receveur par rapport aux dons de donneurs décédés. Cependant, cette démarche altruiste soulève des préoccupations quant à la santé à long terme des donneurs. Parmi les risques? envisagés, l’hypertension artérielle (HTA?) constitue une inquiétude majeure, en raison de la réduction du débit de filtration glomérulaire (DFG?) après la néphrectomie, qui pourrait favoriser une augmentation de la pression artérielle. Les données actuelles restent mitigées sur le lien direct entre don rénal et survenue d’HTA, mais des analyses approfondies permettent de mieux comprendre les implications cliniques.

1. Prévalence de l’HTA chez les donneurs vivants

Des études récentes montrent que l’incidence de l’HTA chez les donneurs vivants varie considérablement selon la population étudiée et les critères d’évaluation. Une étude prospective multicentrique menée par Garg et al. (2024) a révélé une prévalence similaire d’HTA entre les donneurs et les non-donneurs (17 % dans les deux groupes), avec un hazard ratio pondéré de 1,11 (IC 95 % : 0,75-1,66) . Ces résultats, obtenus après un suivi médian de 7,3 ans, montrent que le don rénal ne semble pas augmenter significativement le risque d’HTA chez des donneurs bien sélectionnés.

Cependant, certaines populations, comme les donneurs d’origine africaine ou hispanique, présentent un risque accru d’HTA après don, en partie en raison de facteurs génétiques et socio-économiques. Par exemple, des analyses antérieures ont identifié un risque d’HTA plus élevé chez les donneurs afro-américains, indépendamment de leur statut initial de santé .

2. Mécanismes physiopathologiques

L’HTA post-donation peut être expliquée par plusieurs mécanismes physiopathologiques :

  1. Perte de masse néphronique : Après la néphrectomie, le rein restant compense par une hyperfiltration glomérulaire, augmentant potentiellement le risque de dommages à long terme, y compris une perte progressive de la fonction rénale.

  2. Réduction du DFG : Bien que le DFG diminue initialement de 32 % en moyenne après la donation, les donneurs présentent un taux de déclin annuel du DFG plus lent comparé aux non-donneurs (0,1 mL/min/1,73 m² vs 1,2 mL/min/1,73 m²) . Cependant, environ 47 % des donneurs atteignent un DFG entre 30 et 60 mL/min/1,73 m² au cours du suivi, contre seulement 5 % des non-donneurs.

  3. Albuminurie : La survenue d’une albuminurie est plus fréquente chez les donneurs (15 % contre 11 %), bien que la différence ne soit pas statistiquement significative (HR pondéré : 1,46, IC 95 % : 0,97-2,21) .

3. Conséquences cliniques de l’HTA

L’HTA chez les donneurs de rein vivant peut avoir des répercussions significatives :

Risques cardiovasculaires : Une pression artérielle élevée est associée à un risque accru d’événements cardiovasculaires tels que l’infarctus du myocarde et les AVC. Bien que les donneurs présentent généralement un profil de risque cardiovasculaire favorable avant la donation, l’HTA pourrait exacerber ce risque à long terme.

Progression vers une insuffisance rénale terminale (IRT) : Bien que rare, le risque d’IRT est légèrement plus élevé chez les donneurs comparé aux non-donneurs, particulièrement chez ceux avec des antécédents familiaux d’insuffisance rénale ou d’HTA .

4. Gestion et prévention de l’HTA

Pour minimiser les risques d’HTA et ses complications chez les donneurs vivants, plusieurs stratégies sont recommandées :

  1. Sélection rigoureuse des donneurs : La sélection repose sur des critères stricts, notamment une pression artérielle normale (<140/90 mmHg) et l’absence de comorbidités majeures .

  2. Surveillance post-donation : Une évaluation régulière de la pression artérielle et de la fonction rénale est cruciale pour détecter précocement toute anomalie. Des mesures standardisées de la PA, telles que celles utilisées dans l’étude de Garg et al., pourraient améliorer le suivi clinique .

  3. Modification du mode de vie : Une alimentation pauvre en sel, une activité physique régulière, et une gestion du poids sont essentielles pour maintenir une PA optimale chez les donneurs.

  4. Traitement pharmacologique : Si une HTA est diagnostiquée, un traitement antihypertenseur adapté, notamment les bloqueurs des canaux calciques ou les inhibiteurs du système rénine-angiotensine, pourrait être envisagé.

5. Recommandations des lignes directrices**

Les recommandations actuelles, telles que celles du KDIGO et des sociétés de transplantation, insistent sur :

  • Une évaluation complète des risques pré-donation, en incluant les antécédents familiaux d’HTA ou d’insuffisance rénale.
  • Une surveillance à vie pour détecter les complications potentielles liées au don, y compris l’HTA, l’albuminurie, et le déclin du DFG .

6. Conclusion

Le don de rein vivant est généralement sûr pour des individus sélectionnés selon des critères stricts. Bien que le risque d’HTA après donation semble modeste chez les donneurs standards, il existe des disparités selon les populations et les facteurs de risque individuels. Un suivi médical rigoureux et des interventions précoces sont essentiels pour préserver la santé des donneurs tout en continuant à encourager ce geste altruiste essentiel.

 
 

Références

1. Garg, A. X., et al. (2024). Hypertension and Kidney Function After Living Kidney Donation. JAMA. PMID : 37383830
2. Kasiske, B. L., et al. (2020). Effects of Kidney Donation on Long-term Outcomes. Kidney International. PMID : 31785098
3. Muzaale, A. D., et al. (2014). Risk of end-stage renal disease following live kidney donation. JAMA. PMID : 24496536
4. Lorenz, E. C., et al. (2024). Prospectively Examining Outcomes After Living Kidney Donation. JAMA. PMID : 37383829