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Mise à jour : 27 mars 2024 - Mise en ligne : 11 juin 2025, par Claire MOUNIER-VEHIER
 
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Grandes pourvoyeuses de morbidité, les maladies cardio-vasculaires (CV) sont devenues la première cause de mortalité chez les femmes en Europe et dans les pays industrialisés, surpassant largement d’autres pathologies comme le cancer du sein [Nichols 2013, ESC? 2024].
L’analyse des données épidémiologiques actualisées en 2024 confirme une réduction globale de la mortalité cardiovasculaire, bien que cette tendance soit hétérogène selon les pays européens, en raison de disparités d’accès aux soins et d’initiatives de prévention inégales [ESC 2024]. On recense près de 4,3 millions de décès annuels d’origine cardiovasculaire en Europe, représentant environ 45 % de l’ensemble des décès. Chez les femmes, ce fardeau est particulièrement marqué, avec près de 2 millions de décès chaque année, représentant 51 % de la mortalité CV totale, contre 39 % chez les hommes [ESC 2024].

1. Facteurs de risque et spécificités féminines

Cette tendance défavorable pourrait être liée à une explosion des facteurs de risque métaboliques et environnementaux, combinée à une stagnation des progrès en matière de prévention primaire et secondaire [ESC 2024]. Les femmes européennes ont encore une connaissance insuffisante des spécificités de leur risque CV, ce qui retarde le dépistage et la prise en charge optimale [Mounier-Vehier 2017].

Figure 1 : Causes de mortalité chez la femme. Les maladies CV sont au 1er plan, très loin devant le cancer du sein pourtant plus médiatisé.

Une exposition précoce et prolongée aux facteurs de risque : À l’origine de cette évolution, une conjonction de facteurs socio-comportementaux et hormonaux qui amplifient les pertes de chance [26]. L’exposition accrue des femmes aux facteurs de risque classiques (tabac, stress, sédentarité, diabète, obésité), combinée à des facteurs émergents (syndrome des ovaires polykystiques, endométriose, grossesse compliquée, préménopause précoce), accroît considérablement leur vulnérabilité cardiovasculaire [ESC 2024].

Les facteurs de risque dits « traditionnels » ont un impact plus délétère chez la femme, avec une sensibilité vasculaire exacerbée à l’hypertension artérielle (HTA), au tabagisme et aux déséquilibres hormonaux* [De Peretti 2012, Mosca 2011, Yusuf 2004]. D’après l’étude Framingham, plus de 85 % des femmes de plus de 45 ans présentent au moins un facteur de risque CV majeur, et plus de 60 % en cumulent au moins deux (Lerner 1986) [26].

Bien que les stratégies de prévention cardiovasculaire soient globalement efficaces, elles nécessitent une adaptation spécifique au sexe féminin, en raison de la singularité des mécanismes physiopathologiques impliqués [ESC 2024].

Le taux de mortalité CV prématurée chez la femme reste alarmant : 38 % avant 75 ans et 28 % avant 65 ans. Ce qui est particulièrement préoccupant est l’augmentation des décès CV chez les femmes jeunes, notamment dans la tranche d’âge 25-44 ans où la mortalité a progressé de près de 15 % en dix ans [Townsend 2016, ESC 2024]. Parmi les pathologies CV, l’infarctus du myocarde (IDM) reste une cause majeure de décès féminin, avec 18 500 décès en 2021 en France, dont 44 % de femmes [Gabet 2023, ESC 2024]. L’étude INTERHEART a démontré que le risque d’infarctus du myocarde attribuable à l’hypertension artérielle, au diabète et aux facteurs psychosociaux est nettement plus élevé chez la femme (Yusuf 2004).

Figure 2 : Un impact plus délétère de certains facteurs de risque traditionnels : étude INTERHEART

Une prévention cardio-métabolique essentielle dès la jeunesse : L’hygiène de vie reste le pivot de la prévention cardiovasculaire chez la femme, et son efficacité est d’autant plus marquée lorsqu’elle est instaurée précocement [ESC 2024].

Figure 3 : Effet primordial de l’hygiène de vie dans la prévention cardiovasculaire chez la femme.

2. Données épidémiologiques

L’hypertension artérielle (HTA) est le principal facteur de risque modifiable responsable d’affections cardiovasculaires chez la femme et constitue la première cause d’accident vasculaire cérébral (étude INTERSTROKE) [ESC 2024].

2.1 Aux États-Unis

L’étude Women Health Initiative (WHI) souligne l’impact de l’hypertension chez les femmes ménopausées, avec des implications majeures pour la prévention et la prise en charge [Wassertheil-Smoller 2000, ESC 2024]. Cette étude a inclus 98 705 femmes âgées de 50 à 79 ans, collectant des données sur les facteurs de risque cardiovasculaires, y compris la pression artérielle. La prévalence globale de l’hypertension chez les femmes enrôlées dans WHI était de 38 %, avec 4 % supplémentaires rapportant des antécédents d’HTA sans traitement actif. Parmi les femmes hypertendues, 64 % recevaient un traitement, mais seulement 36 % avaient une pression artérielle contrôlée. L’HTA systolique isolée (PAS élevée avec PAD normale) était présente chez 17 % des participantes.

Figure 4 : Prévalence de l’HTA dans l’étude WHI

La prévalence de l’hypertension augmentait avec l’âge, étant deux fois plus fréquente chez les femmes de la 8ᵉ décennie que dans la 6ᵉ et était influencée par la race et le statut socio-économique. Les principaux déterminants de l’HTA incluaient :

  • Le surpoids et l’obésité : 48 % des femmes avec un IMC > 27,3 contre 29 % avec un IMC < 27,3.

  • L’activité physique : 45 % des femmes sédentaires contre 31 % parmi celles pratiquant une activité physique >4 fois/semaine.

  • La consommation d’alcool : 46 % chez les non-buveuses contre 32 % chez les buveuses modérées et 36 % chez les buveuses excessives.

  • Les antécédents cardiovasculaires ou la présence d’autres facteurs de risque augmentaient fortement la prévalence de l’HTA.

Après ajustement, le risque d’HTA était 25 % plus élevé chez les femmes sous traitement hormonal substitutif (THS). De plus, les femmes sous THS étaient plus souvent traitées pour HTA (ratio 1,26), probablement en raison d’un suivi médical plus régulier. Concernant le traitement antihypertenseur, la majorité des femmes hypertendues étaient sous monothérapie. Les diurétiques offraient le meilleur taux de contrôle (63 %), suivis des bêta-bloqueurs (57 %) et des IEC (56 %). Les bloqueurs des canaux calcium étaient les moins efficaces (50 %). Chez les diabétiques, les bloqueurs des canaux calcium étaient plus fréquemment associés à d’autres traitements.

Dans l’étude Nurses’ Health Study II, suivant 83 882 femmes âgées de 27 à 44 ans sur 14 ans, 12 319 nouveaux cas d’HTA ont été recensés. Les six principaux facteurs protecteurs contre l’HTA étaient :

  • IMC <25

  • 30 min d’exercice physique quotidien

  • Alimentation de type DASH

  • Consommation modérée d’alcool (<10 g/jour)

  • Usage réduit d’analgésiques non narcotiques

  • Supplémentation en folates ≥ 400 µg/jour

Chez les femmes cumulant ces six facteurs protecteurs, le risque d’HTA était réduit de 78 % (HR = 0,22). L’IMC était le facteur de risque le plus influent [Forman 2009, ESC 2024].

2.2 En France

L’étude MONA LISA (Monitoring National du Risque Artériel) (Wagner 2011) a évalué la prévalence et le contrôle de l’HTA en France entre 2005 et 2007 dans trois régions : Lille (Nord), Strasbourg (Bas-Rhin), Toulouse (Haute-Garonne). L’étude a inclus 4 825 sujets âgés de 35 à 74 ans, recrutés aléatoirement. La prévalence de l’HTA était plus élevée chez les hommes (47,2 %) que chez les femmes (34,9 %). Chez les 35-44 ans, la prévalence était de 23,9 % chez les hommes et 8,6 % chez les femmes ; elle atteignait 79,8 % et 71,3 % respectivement chez les 65-74 ans. Seuls 24 % des hommes et 38,5 % des femmes traités avaient une PA contrôlée. L’évolution sur 10 ans (1996-2006) montrait une baisse de l’HTA de 7,5 % chez les hommes et de 18,5 % chez les femmes. Un gradient nord-sud était observé, avec une HTA plus fréquente à Lille et Strasbourg qu’à Toulouse (p<0,0001).

L’étude IDACO a montré que l’HTA nocturne était plus délétère chez la femme, avec une augmentation du risque CV relative à une élévation de 15 mmHg de PAS nocturne de :

  • 56 % chez les femmes contre 32 % chez les hommes pour les événements CV majeurs

  • 62 % contre 35 % pour les AVC

  • 45 % contre 19 % pour les événements cardiaques (Boggia 2011) [38].

L’étude PARITE, menée chez les cardiologues libéraux français, a révélé que les femmes hypertendues étaient moins souvent dépistées pour une ischémie myocardique malgré un risque CV similaire à celui des hommes.

L’enquête FLASH 2011, axée sur l’HTA féminine, a révélé que :

  • 22 % des femmes déclaraient être traitées pour HTA

  • 13 % avaient eu une HTA pendant une grossesse

  • 9 % avaient développé une HTA sous contraception orale

Figure 5 : Prévalence, connaissance et traitement de l’HTA en France, selon le sexe. Données FLASH 2011

3. Mécanismes de la différence de pression artérielle entre les sexes

Les raisons de ces différences ne sont pas encore complètement élucidées, mais plusieurs hypothèses impliquent l’effet des hormones sexuelles sur la régulation rénale du sodium et la résistance vasculaire périphérique.

Les femmes présentent des caractéristiques hémodynamiques distinctes de celles des hommes, avec un débit cardiaque environ 10 % plus élevé et une résistance vasculaire périphérique 10 % plus basse. De plus, leur augmentation de la pression artérielle lors de l’exercice est environ 30 % moins importante que celle des hommes [ESC 2024].

Il est possible que cette résistance vasculaire périphérique plus faible protège partiellement contre les lésions vasculaires associées à l’HTA et réduise ainsi le risque de complications hypertensives. Les mécanismes sous-jacents à ces différences restent incomplètement compris, mais l’influence des œstrogènes semble jouer un rôle clé, bien que non encore formellement démontré [ESC 2024].

Le 17β-estradiol, principal œstrogène endogène chez la femme, favorise la vasodilatation endothélium-dépendante en stimulant la production de monoxyde d’azote (NO) et en inhibant l’activité du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) [ESC 2024]. Cependant, l’effet tensionnel des traitements hormonaux substitutifs (THS) reste controversé, et plusieurs études ont montré que l’HTA post-ménopausique ne dépend pas uniquement de la chute des œstrogènes, mais aussi de changements structurels et fonctionnels vasculaires associés à l’âge [ESC 2024].

À la ménopause (âge moyen de 51 ans), la prévalence de l’HTA féminine rejoint celle des hommes. Ce phénomène s’explique par :

  • La carence progressive en œstrogènes, qui entraîne une perte de leur effet protecteur vasculaire.

  • Des modifications artérielles structurelles et fonctionnelles : épaississement des parois vasculaires, rigidification accrue des artères due à une augmentation du collagène dans la média, et majoration du tonus musculaire lisse, accompagnée d’un dysfonctionnement endothélial [ESC 2024].

Ces changements favorisent le développement d’une HTA systolique isolée, plus fréquente après la ménopause [38]. Expérimentalement, les hormones sexuelles féminines régulent la relation pression artérielle-natriurèse, un mécanisme clé dans la régulation à long terme de la pression artérielle [ESC 2024].

  • Avant la ménopause, les œstrogènes protègent contre l’hypertension induite par le sel en améliorant l’excrétion rénale de sodium.

  • Après la ménopause, cette protection disparaît, rendant la pression artérielle des femmes plus sensible au sel. Cet effet explique en partie l’efficacité supérieure des diurétiques thiazidiques chez les femmes ménopausées, ce qui est cohérent avec les recommandations de l’ESC 2024, qui suggèrent une utilisation préférentielle de ces médicaments dans cette population [ESC 2024].

4. Hypertension artérielle et ménopause (voir aussi 01a - Risque tensionnel de la contraception hormonale et du THM)

Les effets de la ménopause sur la pression artérielle restent controversés. Alors que des études longitudinales comme l’étude Framingham n’avaient pas mis en évidence d’élévation significative de la pression artérielle à cette période, des études transversales plus récentes, notamment NHANES II et les Canadian Heart Health Surveys, indiquent une augmentation de l’incidence de l’hypertension artérielle avec la ménopause, atteignant un pic autour de la soixantaine.

Même après ajustement pour l’âge et l’indice de masse corporelle, le risque de développer une hypertension artérielle est environ deux fois plus élevé chez les femmes ménopausées que chez les femmes préménopausées. Une étude prospective utilisant à la fois la mesure conventionnelle et la mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) a montré que les femmes ménopausées présentent en moyenne une pression artérielle systolique plus élevée de 4 à 5 mmHg par rapport aux femmes préménopausées. De plus, l’élévation de la pression artérielle avec l’âge est plus marquée après la ménopause, avec une augmentation moyenne de 5 mmHg par décennie. Ces données suggèrent que les modifications hormonales associées à la ménopause jouent un rôle important dans cette évolution.

Impact cardiovasculaire de l’hypertension chez la femme ménopausée  : L’hypertension artérielle chez la femme ménopausée est particulièrement délétère, notamment en raison d’un risque cardiovasculaire et cérébrovasculaire accru. Les recommandations des principales sociétés savantes telles que l’AHA, NICE, la SFHTA et la HAS insistent sur la nécessité d’une prise en charge stricte de l’hypertension chez les patientes âgées en raison de leur risque cardiovasculaire élevé.

Facteurs favorisant l’augmentation du risque d’hypertension artérielle à la ménopause : Plusieurs facteurs contribuent à l’augmentation du risque d’hypertension à la ménopause, notamment l’âge, qui entraîne inéluctablement une rigidification artérielle, et l’obésité abdominale, définie par un périmètre abdominal supérieur à 88 cm, qui constitue un facteur de risque métabolique majeur. Le syndrome métabolique, qui touche jusqu’à 50 % des femmes ménopausées, ainsi que des troubles psychologiques tels que l’anxiété et la dépression, peuvent également favoriser l’apparition et l’aggravation de l’hypertension artérielle.

La transition ménopausique, une période critique : Sans des mesures hygiéno-diététiques rigoureuses, la période de transition ménopausique favorise l’apparition du syndrome métabolique, qui accélère le vieillissement artériel et augmente le risque cardiovasculaire. Certaines études suggèrent que la période pré-ménopausique, c’est-à-dire les années précédant l’arrêt définitif des menstruations, pourrait jouer un rôle encore plus important dans cette transition métabolique que la ménopause avérée.

Conséquences métaboliques et vasculaires de la ménopause  : La transition ménopausique entraîne plusieurs modifications métaboliques et vasculaires. Sur le plan métabolique, elle s’accompagne d’une prise de poids androïde, favorisant l’insulino-résistance, ainsi que d’une augmentation du LDL-cholestérol et d’une diminution du HDL-cholestérol, ce qui accentue le risque d’athérogenèse et de diabète. Sur le plan vasculaire, on observe une altération de la fonction endothéliale, une rigidité artérielle accrue due à une accumulation de collagène dans la média des vaisseaux, ainsi qu’une hypercoagulabilité qui favorise les thromboses artérielles et veineuses. Ces changements expliquent la prévalence accrue de l’hypertension systolique après la ménopause et l’accélération du processus athéroscléreux, avec un risque accru de complications thrombotiques. Dès la période de transition ménopausique, le risque cardiovasculaire de la femme rejoint, voire dépasse parfois, celui des hommes du même âge. En ce qui concerne le traitement hormonal de la ménopause (THM), l’hypertension artérielle non contrôlée ou compliquée constitue une contre-indication absolue. En cas d’hypertension bien contrôlée, l’utilisation du THM reste débattue et doit être évaluée au cas par cas en fonction du profil métabolique et vasculaire de chaque patiente.

5. Hypertension artérielle et contraception estro-progestative (voir aussi 01a - Risque tensionnel de la contraception hormonale et du THM)

Selon le Baromètre santé 2010 de l’INPES, 90,2 % des femmes sexuellement actives utilisent un moyen de contraception. La contraception estro-progestative représente le principal mode contraceptif jusqu’à l’âge de 35 ans, avec une prévalence de 70,8 % parmi les femmes sous contraception dans cette tranche d’âge.

Impact cardiovasculaire et hypertension induite par la contraception estro-progestative : L’hypertension secondaire induite par la contraception orale constitue la cause la plus fréquente d’hypertension secondaire chez la femme jeune, touchant environ 5 % des femmes exposées à l’éthinyl-estradiol. Le risque cardiovasculaire associé dépend principalement du dosage de cette hormone. Un dosage supérieur à 50 µg d’éthinyl-estradiol expose particulièrement à une élévation de la pression artérielle. En revanche, le type de progestatif utilisé n’a pas d’impact significatif sur le risque artériel. De plus, l’anneau vaginal et le patch contraceptif, qui contiennent également de l’éthinyl-estradiol, présentent un risque similaire à celui de la contraception orale.

Facteurs favorisant l’apparition d’une hypertension sous contraception estro-progestative  : Trois principaux facteurs de risque sont associés au développement d’une hypertension sous contraception contenant de l’éthinyl-estradiol. Il s’agit d’une hérédité hypertensive, d’une obésité définie par un indice de masse corporelle supérieur à 30 kg/m² et d’un âge supérieur à 35 ans. Cette hypertension d’origine hormonale ne survient pas nécessairement dès l’instauration du traitement, reste généralement modérée et tend à se normaliser après l’arrêt du contraceptif.

Recommandations de prescription et suivi tensionnel : Pour limiter le risque hypertensif, il est recommandé de privilégier les contraceptions estro-progestatives contenant de faibles doses d’éthinyl-estradiol, inférieures à 30 µg. L’utilisation d’un progestatif de deuxième génération est à favoriser en première intention en raison d’un risque thrombotique moindre. La surveillance de la pression artérielle doit être réalisée tous les six mois lors du renouvellement de l’ordonnance. En cas d’augmentation de la pression artérielle sur trois consultations consécutives, l’arrêt de la contraception est recommandé avec la mise en place d’une alternative contraceptive. Dans 90 % des cas, la pression artérielle se normalise dans un délai de trois mois après l’arrêt du contraceptif. Si l’hypertension persiste au-delà de cette période, une évaluation approfondie est nécessaire afin de rechercher une hypertension sous-jacente préexistante et d’envisager un éventuel traitement antihypertenseur.

Réglementation de la contraception estro-progestative en fonction des pays : Les réglementations relatives à l’utilisation de la contraception estro-progestative chez les femmes hypertendues varient selon les pays. En France, l’utilisation de cette contraception est hors autorisation de mise sur le marché chez une femme hypertendue, même lorsque l’hypertension est contrôlée. Aux États-Unis, elle est acceptée en cas d’hypertension contrôlée, sous réserve qu’aucune autre méthode contraceptive ne soit envisageable.

Recommandations de l’ESC 2024 : Les recommandations de l’ESC 2024 insistent sur le fait que la prescription d’une contraception estro-progestative doit être réalisée par un professionnel de santé averti, capable d’évaluer les risques cardiovasculaires potentiels et de proposer des alternatives adaptées en fonction du profil de la patiente.

Tableau récapitulatif : HTA secondaires chez la femme
Certaines causes spécifiques d’HTA sont plus fréquentes chez la femme et doivent être recherchées, notamment en cas d’HTA sévère ou résistante au traitement.
- Maladies auto-immunes (lupus érythémateux systémique, sclérodermie)
- HTA secondaire à une atteinte rénale (glomérulopathie, néphropathie lupique).
- HTA rénovasculaire par dysplasie fibromusculaire (DFM) (Prédominance féminine, survenant avant 40 ans. HTA modérée à sévère avec souffle abdominal ou asymétrie rénale.)
Phéochromocytome : Diagnostic impératif avant une grossesse, en raison du risque majeur de complications hypertensives gestationnelles,
rarissime mais à exclure systématiquement avant une grossesse car une crise hypertensive aiguë en cours de grossesse peut être fatale.
Relations entre contraception, THS et grossesse avec la pression artérielle : Ces liens sont détaillés au chapitre.
Causes iatrogènes fréquentes d’HTA chez la femme
- Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
- Antidépresseurs tricycliques et inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS)

6. Stratification du risque CV chez la femme

L’hypertension artérielle étant un facteur déterminant dans l’augmentation du risque cardiovasculaire, il est essentiel de la dépister à trois périodes clés de la vie hormonale :

  • Avant la mise en place ou le renouvellement d’une contraception, afin d’évaluer la pression artérielle.

  • Lors de la grossesse, avec un dépistage systématique avant la conception et un suivi rigoureux en raison du risque accru de complications hypertensives telles que la prééclampsie ou l’hypertension gravidique.

  • À la ménopause, avec un suivi renforcé durant la période de transition et une adaptation des traitements, en particulier en cas d’initiation d’un traitement hormonal substitutif.

Une stratification du risque cardiovasculaire spécifique chez la femme : Une stratification spécifique du risque cardiovasculaire chez la femme a été proposée par Mosca et al. en 2004 et validée par l’American Heart Association (AHA). Cette approche considère toute femme hypertendue comme étant à risque, indépendamment du traitement.

Figure 6 : Une stratification spécifique du risque cardiovasculaire chez la femme (AHA 2011).

L’American Heart Association et l’American Stroke Association ont également mis en place un score de risque cardiovasculaire spécifique aux femmes, intégrant des variables liées au mode de vie telles que l’âge, le statut tabagique, l’indice de masse corporelle, l’activité physique, la consommation d’alcool et les habitudes alimentaires. Contrairement aux scores classiques, ce modèle permet d’évaluer le risque cardiovasculaire sur vingt ans et prend en compte des paramètres comportementaux et nutritionnels.

Par exemple, une femme de 45 ans ayant une hygiène de vie exemplaire présente un risque cardiovasculaire sept fois inférieur à celui d’une femme du même âge ayant un mode de vie moins favorable. Cet outil innovant pourrait améliorer la prévention primaire et permettre une stratification plus précise du risque chez les femmes considérées comme à faible risque selon les échelles classiques.

Facteurs de risque spécifiques pris en compte : Les recherches récentes ont mis en évidence un lien entre certains antécédents gynécologiques et un risque cardiovasculaire accru. Parmi ces facteurs figurent l’âge à la ménarche, avec un risque cardiovasculaire majoré en cas de survenue avant 11 ans ou après 16,5 ans, ainsi que certaines pathologies gynécologiques telles que l’endométriose, le syndrome des ovaires polykystiques, l’hystérectomie précoce avec ou sans ovariectomie et l’insuffisance ovarienne prématurée avant 40 ans. Ces éléments sont désormais intégrés dans la nouvelle stratification du risque cardiovasculaire féminin.

Impact de la ménopause sur le risque cardiovasculaire : La ménopause représente un tournant majeur dans l’évolution du risque cardiovasculaire chez la femme. En France, elle survient en moyenne à l’âge de 51 ans et s’accompagne d’un déficit progressif en œstrogènes, entraînant des modifications vasculaires et métaboliques. Des études récentes suggèrent que l’accélération du risque cardiovasculaire commence dès la péri-ménopause, avant même l’arrêt complet des menstruations.

Sur le plan métabolique, la ménopause favorise le développement d’un syndrome métabolique touchant une femme sur deux, avec une prise de poids de type androïde favorisant l’insulino-résistance et le diabète, ainsi qu’une diminution du HDL-cholestérol et une augmentation du LDL-cholestérol. Sur le plan vasculaire, on observe une augmentation de la rigidité artérielle, une hypertension systolique prédominante, une activation de la coagulation et une dysfonction endothéliale, contribuant à une majoration du risque thrombotique artériel et veineux. Ces modifications expliquent pourquoi le risque cardiovasculaire des femmes ménopausées rejoint rapidement celui des hommes.

Lien entre le syndrome climatérique et le risque cardiovasculaire : L’intensité des bouffées vasomotrices ménopausiques pourrait constituer un marqueur de risque cardiovasculaire. L’étude SWAN a montré que la présence d’au moins six bouffées vasomotrices par jour est associée à un risque accru d’hypertension, d’élévation du LDL-cholestérol et d’insulino-résistance. Une autre étude a également établi une corrélation entre ces symptômes et une augmentation de la pression artérielle systolique mesurée en ambulatoire. Ainsi, le dépistage des symptômes vasomoteurs de la ménopause devrait être systématique afin d’optimiser la prévention cardiovasculaire.

Vers une stratification adaptée aux femmes françaises : Jusqu’à récemment, la seule stratification disponible pour évaluer le risque cardiovasculaire féminin était celle développée aux États-Unis par Lori Mosca. Celle-ci intégrait des facteurs de risque émergents, notamment hormonaux, psychosociaux et inflammatoires.

Afin de mieux répondre aux spécificités des femmes françaises, la Société Française d’Hypertension Artérielle, en collaboration avec plusieurs sociétés savantes et collèges spécialisés, a élaboré un consensus national intitulé “HTA, hormones et femmes” (document joint en bas de page). Ce document vise à établir une nouvelle stratification du risque cardiovasculaire adaptée aux femmes françaises, en intégrant les facteurs de risque cardiovasculaires classiques, les facteurs hormonaux et les situations à risque émergentes.

La méthodologie de la nouvelle stratification française repose sur plusieurs éléments : l’utilisation du score SCORE recommandée par la Haute Autorité de Santé, l’intégration des facteurs hormonaux et situations émergentes selon la stratification américaine de Mosca, ainsi que la prise en compte des facteurs de risque spécifiques aux patientes hypertendues selon la classification ESC-ESH 2018. Ce modèle permet une évaluation semi-quantitative du risque cardiovasculaire absolu à dix ans.

Figure 7 : Stratification du risque CV chez la femme, selon la SFHTA 2018

Catégories de risque et implications cliniques :

Un risque cardiovasculaire élevé à très élevé nécessite un suivi cardiologique rapproché, en particulier pour les patientes en prévention secondaire, celles avec une fibrillation atriale, une hypercholestérolémie familiale sévère, une hypertension de grade 3 non contrôlée, un diabète compliqué ou une insuffisance rénale modérée. Un score SCORE supérieur ou égal à 5 % est également un critère d’alerte.

Un risque intermédiaire justifie un avis cardiologique en présence d’un ou plusieurs facteurs de risque cardiovasculaire majeurs non contrôlés ou de facteurs émergents spécifiques à la femme, tels qu’une hypertension gravidique, un syndrome des ovaires polykystiques ou une endométriose.

Un risque faible à modéré correspond à une patiente hypertendue légère à modérée dont la pression artérielle est contrôlée et sans autre facteur de risque cardiovasculaire, avec un score SCORE inférieur à 5 %.

Intégration dans la pratique clinique : Cette nouvelle stratification permet de guider le praticien dans la détermination des explorations cardiovasculaires nécessaires, l’adaptation du suivi et la prise de décision concernant la prescription hormonale, qu’il s’agisse de contraception ou de traitement hormonal substitutif.

L’hypertension et le risque cardiovasculaire chez la femme nécessitent donc une approche spécifique prenant en compte les facteurs hormonaux et les situations émergentes. La stratification française du risque cardiovasculaire constitue un outil essentiel pour une prise en charge adaptée et personnalisée. Une consultation systématique à la ménopause pourrait permettre un dépistage précoce des facteurs de risque, une meilleure individualisation des traitements et une réduction significative du risque cardiovasculaire à long terme.

7. Traitements pharmacologiques de l’hypertension chez la femme : Effets sur les événements cardiovasculaires

Les données issues des essais cliniques et des méta-analyses suggèrent que les traitements antihypertenseurs réduisent de manière significative le risque d’événements cardiovasculaires chez la femme. Toutefois, le bénéfice absolu observé est légèrement inférieur à celui des hommes, en raison d’un risque cardiovasculaire de base plus faible.

Une méta-analyse de sept essais randomisés contrôlés de la base INDANA a démontré un bénéfice significatif du traitement antihypertenseur chez les femmes. Les femmes traitées par diurétiques thiazidiques ou bêta-bloqueurs ont présenté une réduction significative du risque d’accident vasculaire cérébral et des événements cardiovasculaires majeurs, à l’exception des événements coronariens. Exprimé sous forme de risque relatif, le bénéfice du traitement antihypertenseur n’est pas significativement différent entre les hommes et les femmes. Cependant, le bénéfice absolu est moindre chez la femme en raison d’un risque absolu d’événements coronariens plus faible dans cette population.

Figure 8 : Méta-analyses des essais du traitement antihypertenseur comparés chez l’homme et chez la femme.

Études majeures sur les antihypertenseurs et impact différentiel selon le sexe

L’étude HOPE a évalué les effets du ramipril, un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, sur la survenue d’événements cardiovasculaires chez des hommes et des femmes âgés de plus de 54 ans présentant une maladie cardiovasculaire avérée. Environ la moitié des participants avaient une hypertension contrôlée à l’inclusion. Le traitement par ramipril a permis une réduction du risque d’infarctus, d’accident vasculaire cérébral et de mortalité cardiovasculaire de 23 %, avec un bénéfice similaire entre les sexes, la réduction relative du risque chez la femme étant de 38 %. Ces bénéfices étaient associés à une baisse significative de la pression artérielle, confirmée par la mesure ambulatoire de la pression artérielle.

L’étude LIFE a inclus plus de neuf mille patients hypertendus présentant une hypertrophie ventriculaire gauche, dont près de cinq mille femmes. Les patients ont été randomisés pour recevoir soit du losartan, un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II, soit de l’aténolol, un bêta-bloqueur. Chez les femmes, le losartan a permis une réduction supplémentaire de 13 % du critère combiné infarctus, accident vasculaire cérébral et mortalité cardiovasculaire, ainsi qu’une diminution de 25 % des accidents vasculaires cérébraux et une réduction de l’incidence du diabète. Ces résultats suggèrent que le losartan est plus efficace que l’aténolol chez les femmes hypertendues avec hypertrophie ventriculaire gauche, notamment pour la prévention des accidents vasculaires cérébraux et du diabète.

L’étude ALLHAT a comparé l’efficacité de plusieurs classes thérapeutiques sur plus de quarante mille patients hypertendus à haut risque, dont près de vingt mille femmes. Les traitements étudiés comprenaient un diurétique thiazidique, un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, un bloqueur des canaux calciques et un alpha-bloquant, ce dernier ayant été interrompu prématurément en raison d’un excès d’insuffisance cardiaque et d’événements cardiovasculaires majeurs. L’étude n’a pas mis en évidence de différence significative entre les diurétiques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les bloqueurs des canaux calciques sur la mortalité toutes causes confondues. Cependant, les diurétiques thiazidiques se sont révélés supérieurs pour la prévention des accidents vasculaires cérébraux et de l’insuffisance cardiaque, ce qui a conduit les investigateurs à recommander leur utilisation en première intention, y compris chez la femme.

L’étude WHI-OS a suivi plus de trente mille femmes sans antécédents cardiovasculaires pendant près de six ans afin d’évaluer l’impact des différentes classes d’antihypertenseurs. Il a été observé une augmentation du risque de mortalité cardiovasculaire avec les bloqueurs des canaux calciques par rapport aux diurétiques thiazidiques. De plus, l’association diurétiques et bloqueurs des canaux calciques semblait associée à un risque plus élevé de mortalité comparée à l’association diurétiques et bêta-bloqueurs. Toutefois, aucune différence significative n’a été retrouvée entre les autres classes thérapeutiques. Cette étude étant observationnelle, un risque de biais résiduel demeure malgré l’ajustement des facteurs de confusion.

8. Recommandations thérapeutiques

Les seuils d’initiation du traitement antihypertenseur, les objectifs tensionnels et le choix des médicaments antihypertenseurs sont globalement similaires chez la femme et chez l’homme. Toutefois, certaines spécificités existent en fonction des différentes phases hormonales telles que la contraception, la grossesse et la ménopause, ainsi que des différences physiopathologiques.

Importance des modifications du mode de vie : Les recommandations actuelles insistent sur l’intérêt des mesures hygiéno-diététiques, qui permettent de prévenir la progression vers une hypertension sévère, de réduire le risque cardiovasculaire indépendamment de la baisse tensionnelle et d’optimiser l’efficacité des traitements médicamenteux.

Parmi ces interventions, la perte de poids et la pratique d’un exercice aérobique sont les plus efficaces pour diminuer la pression artérielle. Cependant, l’étude TOMHS a montré que les femmes répondent moins bien que les hommes à ces mesures, notamment en raison d’une difficulté accrue à perdre du poids, liée à une sédentarité plus fréquente et à une prévalence plus élevée de l’obésité, en particulier chez les femmes afro-américaines. En revanche, elles montrent une meilleure réponse tensionnelle à la restriction sodée, en particulier après 65 ans et chez les femmes noires.

Stratégie thérapeutique chez la femme hypertendue : Les recommandations de l’ESC 2024 et celles des sociétés savantes françaises, comme la HAS et la SFHTA, préconisent un plan de soins structuré sur six mois, comprenant plusieurs étapes. Cela inclut une consultation d’information à l’annonce du diagnostic, une confirmation diagnostique par mesure ambulatoire de la pression artérielle à l’aide d’une mesure ambulatoire ou de l’automesure, la lutte contre la non-observance et l’inertie médicale, ainsi qu’un contrôle tensionnel optimal avec un objectif inférieur à 140/90 mmHg en consultation et inférieur à 135/85 mmHg en ambulatoire diurne. Chez les patients âgés de plus de 80 ans, la pression artérielle systolique cible est inférieure à 150 mmHg, à condition d’éviter toute hypotension orthostatique.

Une exception est faite en cas de grossesse, où les bloqueurs du système rénine-angiotensine, incluant les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II, ainsi que les diurétiques, sont contre-indiqués, sauf dans des cas particuliers sous surveillance spécialisée.

Choix thérapeutique selon le profil de la patiente : Il n’existe pas de recommandation spécifique selon le sexe, sauf pour les situations liées à la grossesse et à la ménopause. L’âge et les comorbidités sont les principaux déterminants du choix du traitement initial.

Les diurétiques thiazidiques sont souvent privilégiés, notamment après la ménopause, en raison de leurs bénéfices additionnels sur la réduction du risque d’ostéoporose grâce à leur effet hypocalciurique et de leur efficacité accrue chez les femmes présentant une hypertension sensible au sel. Toutefois, ils sont associés à des effets indésirables tels que l’hyponatrémie, l’hypokaliémie et l’hyperglycémie.

Les IEC et les ARA2 sont indiqués chez les femmes hypertendues à haut risque cardiovasculaire, notamment en cas d’atteinte d’organe cible, de diabète ou d’hypertrophie ventriculaire gauche. Cependant, ils sont contre-indiqués en cas de grossesse ou de désir de grossesse. Par ailleurs, la toux induite par les IEC est environ trois fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme.

Les bêta-bloqueurs sont moins efficaces en monothérapie chez la femme mais sont privilégiés en cas de comorbidités telles qu’une cardiopathie ischémique, une tachycardie ou une insuffisance cardiaque.

Les BCC de type dihydropyridine constituent une alternative efficace après la ménopause. Toutefois, ils sont souvent mal tolérés en cas d’insuffisance veineuse ou de symptômes climatériques et peuvent provoquer des œdèmes des membres inférieurs, plus fréquents chez la femme que chez l’homme.

Effets secondaires spécifiques aux femmes : Certains effets indésirables des antihypertenseurs sont plus fréquents chez la femme que chez l’homme. Les diurétiques thiazidiques sont associés à un risque accru d’hyponatrémie et d’hypokaliémie. Les iIEC entraînent une toux sèche plus fréquente chez la femme. Les BCC peuvent provoquer des œdèmes des membres inférieurs. Le minoxidil est susceptible d’induire un hirsutisme, tandis que les bêta-bloqueurs sont souvent moins bien tolérés sur le plan métabolique.

En outre, certains traitements antihypertenseurs présentent un risque tératogène. Les IEC et les ARA2 sont contre-indiqués chez les femmes enceintes ou en âge de procréer sans contraception efficace, en raison du risque d’anomalies fœtales graves, telles que la dysplasie rénale et l’anurie néonatale.

Classe thérapeutique Effets indésirables plus fréquents chez la femme
Diurétiques thiazidiques Hyponatrémie, hypokaliémie
IEC Toux sèche (3× plus fréquente que chez l’homme)
BCC dihydropyridines Œdèmes des membres inférieurs
Minoxidil (Lonoten®) Hirsutisme
Bêta-bloqueurs Intolérance plus fréquente aux effets secondaires métaboliques

Synthèse des recommandations ESC 2024 pour la femme hypertendue

Les recommandations générales préconisent l’utilisation des diurétiques thiazidiques en première ligne, notamment chez les femmes ménopausées. Les IEC et les ARA2 ont démontré un effet protecteur cardiovasculaire, particulièrement pour la prévention des accidents vasculaires cérébraux et du diabète. Les bêta-bloqueurs sont à privilégier chez les patientes présentant des comorbidités telles qu’une cardiopathie ischémique, une insuffisance cardiaque ou une tachycardie. Les bloqueurs des canaux calcium de type dihydropyridine doivent être utilisés avec prudence en cas d’insuffisance veineuse. Enfin, dès qu’une bithérapie est nécessaire, un diurétique thiazidique doit être intégré dans l’association thérapeutique.

Avant la ménopause, une surveillance renforcée de la pression artérielle est nécessaire chez les femmes utilisant une contraception hormonale. Il est recommandé de privilégier des traitements bien tolérés en cas de grossesse potentielle, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II étant contre-indiqués.

Après la ménopause, l’hypertension devient principalement systolique, justifiant la préférence pour les diurétiques thiazidiques et les bloqueurs des canaux calcium. Une surveillance accrue du risque métabolique et thrombotique est également recommandée.

En cas d’hypertension résistante ou sévère, une recherche systématique d’une cause secondaire doit être réalisée, incluant des pathologies telles que la dysplasie fibromusculaire ou l’hyperaldostéronisme. L’intégration précoce d’associations thérapeutiques efficaces est nécessaire pour assurer un contrôle optimal de la pression artérielle.

Conclusion : Les seuils de traitement et les objectifs tensionnels sont similaires entre hommes et femmes, sauf en cas de grossesse. Les diurétiques thiazidiques constituent la pierre angulaire du traitement après la ménopause, en raison de leur efficacité tensionnelle et de leurs bénéfices osseux. Les IEC et les ARA2 doivent être privilégiés chez les femmes à haut risque cardiovasculaire, sauf en cas de grossesse ou de désir de grossesse. Les femmes rapportent plus d’effets secondaires aux antihypertenseurs, nécessitant un suivi adapté et une personnalisation du traitement.

9. Points essentiels à retenir

Avant la ménopause, les complications de l’hypertension artérielle sont moins fréquentes chez la femme que chez l’homme. Le risque d’événements cardiovasculaires liés à l’hypertension est significativement plus bas, ce qui est principalement attribuable à une incidence plus faible de l’insuffisance coronaire. Celle-ci est environ deux fois moins fréquente chez la femme que chez l’homme d’âge et de pression artérielle comparables. De plus, l’hypertrophie ventriculaire gauche est moins marquée chez la femme. En revanche, la différence d’incidence des accidents vasculaires cérébraux entre les sexes est moins prononcée, et les femmes hypertendues restent particulièrement exposées aux complications cérébrovasculaires.

Le traitement antihypertenseur présente une efficacité comparable chez l’homme et la femme. Le bénéfice relatif est similaire entre les sexes, bien que le bénéfice absolu soit moindre chez la femme en raison d’un risque initial plus faible, notamment pour les complications coronariennes. Chez l’homme, le traitement permet de réduire significativement le risque coronarien et cérébral, tandis que chez la femme, l’effet protecteur concerne surtout la diminution du risque d’accident vasculaire cérébral.

Avant d’initier un traitement antihypertenseur chez la femme, il est essentiel d’évaluer le risque cardiovasculaire global. L’hypertension seule ne constitue pas toujours un facteur déterminant de risque chez la femme jeune. L’intégration d’autres facteurs de risque, tels que le tabagisme, le diabète, la dyslipidémie, l’obésité ou les antécédents obstétricaux, est indispensable pour établir une prise en charge adaptée. Celle-ci doit être personnalisée et tenir compte des spécificités hormonales et métaboliques féminines, notamment la contraception, la grossesse et la ménopause.

En conclusion, l’hypertension chez la femme présente des particularités physiopathologiques et cliniques distinctes, qui influencent à la fois le risque cardiovasculaire et la réponse aux traitements. La prise en charge doit être adaptée à chaque phase hormonale afin de maximiser les bénéfices du traitement et de limiter les risques associés.

 
 

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